Actes du colloque prévus avril 2017 International audience Cette communication propose une réflexion sur les jardins de mer (elao) à Tongoa, petite île de 42 km située dans le groupement central des îles Shepherd au Vanuatu. Aux abords des côtes se trouvent un volcan sous-marin et des ressources halieutiques abondantes. Le littoral et le peu profond sont privés et socialisés, tandis que la pleine mer est publique, il n'est plus question d'y respecter une quelconque hiérarchie sociale. La côte est divisée en parcelles nommées qui appartiennent toutes à des clans définis (namatana). La jouissance des ressources est accessible à tous, dans la mesure où les propriétaires fonciers n'en ont pas bloqué l'accès. Elles peuvent être interdites durant plusieurs mois, voire de nombreuses années, après le décès de l'un des membres du clan et signifient ainsi la période de deuil. Elles peuvent également être fermées afin que soient rationalisés les stocks des espèces ichtyologiques quand ceux-ci semblent moins conséquents ou moins diversifiés. Qu'ils aillent dans leurs parcelles de terre pour y retirer de quoi se sustenter, ou qu'ils aillent en mer pour y remonter des profondeurs des poissons ou encore qu'ils prélèvent du littoral des crabes et des coquillages, les habitants emploient toujours la même expression : ils partent travailler (afak posiwosi). La mer, tout comme le sont les jardins de terre, constitue un espace dans lequel il faut oeuvrer pour obtenir de quoi se nourrir. Nous postulons que le clivage décrit par Joël Bonnemaison entre gens de la terre et gens de la mer au Vanuatu est ici absent (1986). La mer est en effet bien plus que le simple prolongement de l'île, omniprésente par les activités qu'elle permet, les ressources permanentes qu'elle offre et les représentations qu'elle suscite, elle est un véritable espace socialisé. Nous démontrerons ceci en présentant dans un premier temps la territorialisation du littoral et sa tenure foncière, puis nous décrirons les différentes pratiques et techniques de collecte et de pêche, en distinguant le travail des hommes et des femmes tout en précisant la classification des espèces aquatiques observée.