Depuis les débuts de la recherche archéologique dans le Pacifique Sud-Ouest, la poterie est la référence qui a permis de définir les étapes du peuplement initial et de l'évolution sociale et culturelle. Ce choix, presque obligé dans un monde où les témoins durables sont rares et peu divers, a eu des conséquences importantes sur le regard porté par les chercheurs aux sociétés préhistoriques dans ces îles. Pendant de nombreuses années, la possibilité d'un peuplement précéramique n'était pas envisagée pour expliquer le peuplement du sud de la Mélanésie et seule la poterie rouge de style Lapita avait été jugée suffisamment distinctive pour expliquer cette migration. Il a fallu le courage et le travail imposant de José Garanger dans les îles du centre du Vanuatu (anciennement Nouvelles-Hébrides) pour imposer l'idée d'une culture ancienne mélanésienne, caractérisée par la poterie de type Mangaasi, alors même que la seule poterie reconnue préhistorique, le Lapita, était attribuée aux Polynésiens anciens. Ce travail magistral a servi de structure aux travaux ultérieurs et, loin de le contredire, les résultats récents en confirment l'essence. A la suite de ces travaux, les chercheurs étendirent le concept du Mangaasi à toutes les poteries incisées ou appliquées des îles de Mélanésie. Nous discuterons plus loin le bienfondé de cette généralisation.