Les Baruya reconnaissent, au sein de leur groupe, l’existence d’individus qui possèdent des dons qui font d’eux des êtres hors du commun: le grand-guerrier, le chasseur de casoar et le chamane. L’étude de ce dernier personnage fait ressortir des caractéristiques qui rendent compte de la complexité de cette fonction: - être chamane relève d’une initiation particulière; - cette fonction est la seule qui associe hommes et femmes, même si la différence entre les sexes est attestée au cours de la cérémonie, dans les capacités thérapeutiques respectives et dans le partage des tâches (l’usage des pouvoirs chamaniques dans la conduite de la guerre est exclusivement masculin); - la collectivité des chamanes peut apparaitre comme un groupe constitué, comme une confrérie qui pourrait mettre ses pouvoirs au service de ses intérêts; - l’aptitude thérapeutique du chamane, objet d’étude souvent privilégie dans l’approche du chamanisme s’avère, pour l’exemple Baruya, comme indissociable de la faculté latente de nuire, faculté qui s’accorde avec la nature du pouvoir du double du chamane, dont l’agressivité est le gage de l’efficacité. Le monde de l’invisible est le lieu d'où proviennent et où retournent les malades résultant d’agressions surnaturelles ou d’intentions malveillantes des chamanes ennemis. C’est aussi le lieu où s'exerce la quête des maladies et le pouvoir chamanique, lieu étranger aux profanes. A tout instant se pose donc au groupe le problème du contrôle de ses chamanes, afin que ceux-ci demeurent des êtres positifs, voué au service de l’intérêt personnel de chaque malade et à l’intérêt commun de tous dans la pratique de la guerre magique livrée aux ennemis.