Fermement convaincus de la supériorité du « sang » et de la « civilisation » britanniques dont ils étaient les héritiers, mais très éloignés de la métropole et redoutant l'importation d'une main-d'oeuvre de couleur bon marché presque autant qu'ils craignaient la menace d'une invasion asiatique, les Australiens virent longtemps dans l'exclusion le meilleur moyen de se protéger. Durant toute la période coloniale et jusque dans les années qui suivirent la Seconde Guerre mondiale, les autorités tentèrent ainsi de contenir une diversité ethnique réelle, bien que proportionnellement faible, afin de préserver, espéraient-elles, l'intégrité de la société australienne. Qu'il se soit agi d'écarter les « races indésirables » du marché du travail ou de ménager aux Aborigènes une « fin paisible » puisque leur extinction était considérée comme inéluctable, la gestion de la diversité ethnique en Australie ne fut jamais d'une grande cohérence, variant souvent d'un lieu à l'autre et au gré des circonstances économiques et politiques. De fait, si elle se nourrit largement des idées racisantes qui avaient cours à l'époque dans l'ensemble du monde occidental, son application ne releva jamais d'une quelconque théorisation raciale ad hoc comme cela fut le cas sous d'autre cieux. L'Australie d'aujourd'hui aime à projeter l'image d'une nation harmonieusement multiculturelle et réconciliée avec ses populations autochtones. La réalité n'est certes pas à ce point idyllique, mais l'Australie a indéniablement su intégrer les bouleversements qu'elle a subis depuis la Seconde Guerre mondiale et, malgré la résurgence chronique de vieux démons xénophobes, maintenir un équilibre entre intégration et respect de la diversité dont on connaît la nature intrinsèquement si fragile.