Les jardins de l’île de Tanna sont des jardins magiques. L’horticulture vivrière traditionnelle se déroule comme un rituel, mais ce faisant, elle obtient des rendements élevés sur des surfaces minimales, de l’ordre de 20 à 30 tonnes de tubercules à l’hectare. Tant que la croyance dans la vision magique du monde persiste, les jardins sont « coutumiers », c’est-à-dire qu’ils sont beaux et abondants. Un certain équilibre se maintient également dans la répartition des tâches agricoles entre les femmes et les hommes. Inversement, lorsque cette croyance disparaît, l’horticulture se « désintensifie » et n’obtient plus que des rendements moyens ou médiocres sur des surfaces plus étendues. Cet article constitue un essai de « lecture multi-centrée » des systèmes des jardins de Tanna et conduit à s’interroger sur le sens d’une évolution moderniste, qui n’est pas forcément une évolution de progrès.